Comment voyez-vous la pédopsychiatrie d’aujourd’hui ?

Dre Nadia Micali – Tout d’abord, il s’agit d’une discipline que l’on a malheureusement toujours eu tendance à percevoir comme une « petite spécialité ». Elle est pourtant très importante du simple fait que l’on travaille avec des enfants en plein développement, c’est-à-dire à un moment déterminant de leur vie. On intervient à un stade où certaines choses qui peuvent influencer leur avenir se mettent en place. Je pense aussi que la pédopsychiatrie est une spécialité compliquée, car on ne peut pas travailler seulement avec l’enfant ; il faut collaborer avec un réseau incluant nécessairement la famille, l’école, etc. De plus, nous faisons actuellement face à des défis particuliers qui découlent d’un phénomène social d’« adultification » des enfants. Depuis leur plus jeune âge, ceux-ci sont confrontés au monde des adultes, essentiellement via internet et les réseaux sociaux. En un clic, ils ont accès à des contenus qui les dépassent, si bien qu’il leur est parfois difficile de rester des enfants. Je ne parle pas seulement d’informations sur la sexualité ; ils sont submergés par des informations de toute sorte.

 

Vous faites par exemple allusion aux conseils diététiques ?

Oui. Les enfants ont accès à des données très détaillées – trop détaillées parfois - pour leur capacité de compréhension. Au niveau de la prévention, je pense qu’il y a un équilibre difficile à trouver. Notre société est tiraillée entre une peur panique de l’obésité et le besoin rationnel de donner aux jeunes générations des informations sur l’alimentation saine. C’est un vrai challenge, d’autant que l’on ne sait pas encore très bien comment prévenir efficacement l’obésité. De mon point de vue, il devrait être possible de prévenir simultanément l’obésité et les troubles alimentaires en général, car il s’agit d’un spectre de pathologies qui forment un continuum.

 

Qu’avez-vous l’intention d’entreprendre aux HUG ?

Je suis arrivée aux HUG il y a neuf mois après une formation spécialisée dans les troubles alimentaires à Londres et à New York. Nous sommes en train de créer une chaîne de soins pour les enfants et les adolescents qui présentent des troubles alimentaires. Ce projet s’articule autour de recherches internationales. Il tient compte à la fois de données evidence based, des dernières recommandations en matière de prise en charge, de l’expertise existante aux HUG et de mon expérience acquise à l’étranger dans la recherche et en milieu clinique.