L’autre décision d’importance, prise en pleine canicule, est celle des objectifs de coûts de la santé dont les contours restent encore flous. Nous resterons attentifs à tout budget global auquel nous nous opposerons avec force, car dans un pays qui offre une qualité et un

accès aux soins incomparables, toute volonté d’imposer un rationnement des soins, sous couvert de coûts maximaux, serait là aussi un non-sens total. Garder la tête froide, alors même que la hausse des primes d’assurance-maladie est pré-annoncée pour cet automne, devrait être l’évidence.

La future hausse des primes agite le monde politique. +3, 4, 5, ou + 6% ? Personne ne sait actuellement qu’elle sera l’augmentation des primes après deux années de COVID-19. Lorsque l’on regarde de plus près les chiffres publiés par l’Office fédéral de la santé publique, on constate que la plus forte hausse est celle concernant la physiothérapie,

+17%. Ce chiffre est parfaitement en phase avec la période de crise sanitaire traversée. La population épuisée, fatiguée peut en avoir eu « plein le dos » et les séances de physiothérapie respiratoire se sont succédées et se poursuivent parmi les patients atteints par le coronavirus et ceux présentant un COVID-long. Ce n’est là que le miroir de notre société.

La hausse, après deux années de quasi-stabilisation, a de quoi questionner, mais si l’on prend les cinq dernières années (2017- 21), on constate une augmentation annuelle de moins de deux pourcents, largement en deçà des objectifs fixés en 2016 par le panel d’experts internationaux mandaté par le Conseil fédéral qui tablait sur une hausse annuelle des coûts de 3% pour la Suisse. Au-delà des polémiques sur les réserves exorbitantes des assureurs-maladie et le surfinancement du système par des primes trop élevées, la transparence souhaitée tarde à voir le jour. Il est temps, face à un financement de la santé qui est à bout de souffle, de changer de paradigme.

Nous devrions vivre une énième hausse des primes en septembre avec son lot de coupables tout désignés. Les médecins, les physiothérapeutes seront certainement de ceux-là. Peu nombreux seront les observateurs qui regarderont le travail exceptionnel effectué par l’ensemble des soignants au cours des deux dernières années et qui auront la faculté d’intégrer cette nouvelle hausse dans la prise en compte globale et rassurante de ces dernières années. Un élément reste perturbant : l’évolution de la bourse qui semble depuis l’introduction de la LAMal être un indicateur fiable du niveau des augmentation des primes. Lorsque les temps sont à l’orage et que les bourses dégringolent, comme cette année, la hausse des primes prend l’ascenseur et lorsque la bourse atteint des sommets, les primes sont plus douces et les hausses bien plus faibles. Et cela depuis plus de vingt ans ! Les courbes de la bourse et des primes se suivent étrangement. Les hausses excessives ne seraient-elles là que pour rattraper les pertes et ainsi reconstituer les réserves ?

L’été est là, mais l’automne est déjà dans toutes les têtes. Le Parlement a agi en mettant un plafond aux coûts et en faisant les soldes. Des actions qui démontrent l’impossibilité politique de réformer un financement et une tarification qui sentent la naphtaline et qui malheureusement repartent pour un tour. Terrible constat qui appelle à des réformes en profondeur, mais la fragmentation du système de la santé et les intérêts particuliers des différents acteurs paralysent toute velléité.

Editorial de la Lettre de l'AMGe du mois de juillet 2022